Interview – Marie Pellegrin

Interview – Marie Pellegrin

Réserviste aux JEM de Lexington en 2010, mais gagnante en Coupe des Nations et  3ème du Grand Prix de Calgary avec Admirable, Marie Pellegrin revient au plus haut niveau avec une écurie remplie de chevaux de grande qualité. Parmi eux, l’étalon Deuxcatsix d’Eglefin, avec lequel elle a participé à la Coupe des Nations et au GP du CSIO de Falsterbo le week-end dernier. 

Deuxcatsix (Vigo Cece x Bamako de Muze) est votre cheval de tête. Pouvez-vous nous parler de lui ? Quelles sont ses plus grandes qualités ? Ses petits défauts ? 

Je l’ai acheté à cinq ans. Il a des capacités physiques assez démesurées, en termes d’amplitude, de moyens et de trajectoire. C’est impressionnant. Depuis Admirable, je n’avais pas monté un cheval avec autant de moyens et je me demande même s’il n’en a pas encore plus. C’est aussi un cheval très intelligent, très respectueux et très sensible. Il y a du sang, mais du bon sang. Pour un étalon. Il est très gentil. Il a toujours la porte du box ouverte à la maison. En concours, il est à côté de tous les chevaux et il n’y a pas besoin de lui mettre de l’électricité. C’est très appréciable. Si ce n’était un étalon un peu plus sanguin, un peu plus compliqué à manipuler, il ne serait pas dans mon écurie parce que ça n’irait pas avec notre fonctionnement. On est très proche des chevaux, on s’en occupe beaucoup. Ils sont beaucoup manipulés et beaucoup sortis. En plus, je n’ai quasiment que des filles à l’écurie. Donc son caractère est vraiment une grande qualité. Après, je dirais que son défaut est le défaut de ses qualités. Il est emmené par sa masse et par son moteur. Sa croupe est plus haute que le garrot. Donc on doit lui demander de tenir son garrot et son équilibre. Il doit m’écouter, mais il doit être content de m’écouter.

C’est aussi un étalon dont on commence à voir les produits en concours. Que pensez-vous de ses premiers produits ? 

C’est encore un peu tôt pour dire, mais en tout cas, de ce qu’on voit, il produit avec de la taille, de l’envergure et beaucoup de chic. On voit quelques produits qui sautent vraiment, qui sortent de l’ordinaire. Après, les origines parlent aussi. Il a un papier exceptionnel.  Mon père, qui est vraiment très bon dans toutes les origines, avait tout de suite adoré le papier avant même de l’avoir vu sauter. Quand il a vu le papier, il a dit “Il le faut absolument !” Il se trompe très rarement, je dois dire. Je n’achète pas un cheval sans qu’il ait vu les papiers. 

Donc vous travaillez en famille.

Oui. Ma mère a un très bon sentiment. Mon père aussi, mais lui est vraiment très calé sur tout ce qui est origines. Il a une mémoire assez exceptionnelle et il est passionné. Mon sentiment sur cheval et le leur en plus. C’est comme ça qu’on choisit les chevaux. Sur le tout petit nombre de chevaux que j’achète, j’avais calculé, je crois, que j’ai 98 % de chevaux qui ont fait 4* et dans les 2% qui restent, la plupart du temps c’est parce qu’il y a eu des problèmes physiques. On a notre petit système, notre petit schéma, notre mode de fonctionnement. Les erreurs d’achat que j’ai faites, c’est quand je suis sortie de mon schéma de fonctionnement ou quand je me suis laissée un peu forcer la main et que j’ai écouté quelqu’un au lieu de faire confiance à mon sentiment. Mais c’est subjectif, parce que je n’en ai aucun qui se ressemble. Mais il faut qu’il ait une bonne tête et de bons yeux.

Il faut leur donner envie de faire. 

C’est ça. J’ai besoin de collaborer avec eux. Il faut qu’ils aient envie de jouer avec moi en piste et qu’ils comprennent le but du jeu. Je ne sais pas faire autrement. Il faut que ce soit mes copains. C’est ça qui est dur à trouver comme juste-milieu avec un étalon. Je n’avais jamais monté d’étalon en piste, donc je ne savais pas trop comment m’y prendre. Ce n’est ni une jument ni un hongre. Il fallait que je trouve le mode d’emploi. Pour qu’il m’écoute, mais qu’il soit content de le faire,en fait il faut qu’il ait un peu l’impression que l’idée vient de lui.

Le week-end dernier, vous avez participé au CSIO de Falsterbo. Comment ça s’est passé. 

Dans la coupe, je n’ai pas assez bien monté toute une ligne. Je fais faute sur la rivière et deux fautes après la rivière. Le reste, le cheval s’est promené. Dans le grand prix, on fait 4 points et du temps dépassé. Il faut se remettre sur ces difficultés-là, sur cette hauteur, et sur les contraintes de temps qui est encore plus court que dans les autres concours. J’étais un peu déçu de moi. Mais après, il faut tout de suite savoir où on a fait des erreurs et réagir immédiatement. Pour ce concours, c’est Olivier Guillon qui nous a accompagnés comme chef d’équipe. C’est quelqu’un de positif, fédérateur, compétent et gentil. On était vraiment très content qu’il soit avec nous. 

En même temps, il faut toujours au moins faire plusieurs concours de ce niveau pour prendre la mesure de ses épreuves de CSIO5* et passer le cap pour y être compétitif.

Complètement. Là, on va aller à Hickstead la semaine prochaine. Je suis très contente de faire deux CSIO à la suite.  Comme ça, je reste dans le bain, parce que c’était une reprise de contact.

Les épreuves par équipe, les Coupe des Nations, les Championnats, etc. C’est quelque chose que vous aimez ? 

C’est ce que je préfère. J’ai toujours aimé ça. J’ai fait mon premier championnat d’Europe poney à douze ans et trois championnats d’Europe Poney, puis deux en juniors et trois en jeunes cavaliers. Après, j’ai fait des épreuves en équipe de France et en équipe Suisse, en seconde ligne et là, de nouveau en première ligne.

Qu’est-ce qu’elles ont de particulier, ces épreuves par équipe ?

On représente son pays, c’est la première chose. Je trouve ça beau d’aller représenter les couleurs de son pays. C’est un honneur. Dans l’épreuve par équipe, on monte aussi pour les autres. On a ce sentiment de devoir être à la hauteur pour ne pas pénaliser les autres. Cet effet de groupe est vraiment très sympa et très grisant. On a vraiment à cœur de tous réussir et de représenter le pays. Clairement, c’est toujours ce que j’ai préféré faire.

Comme à Falsterbo, le week-end prochain, vous allez être accompagné de deux autres chevaux. Floc qui est un fils de Qlassic Bois Margot et de SI Vive (qui est une fille de O’Vive, la mère de l’étalon Upsilon) et qui s’est déjà classé sur 1,50m, et Fini l’Amour (L’Arc de Triomphe x Canadian River) est régulièrement classé dans des épreuves 1,40m à 1,50m, dont 2 épreuves à Falsterbo. Ils semblent tous les deux très prometteurs.

Ils sont exceptionnels. Les deux sont déjà classés sur 1,50m et peuvent devenir des chevaux de Grand Prix 1,60m. J’ai acheté Floc à 3 ans à la famille Sisqueille, qui sont des amis de la famille. On a eu plusieurs chevaux de leur élevage, parce qu’ils ont cette souche anglo qui est vraiment très bonne. J’ai eu un coup de foudre sur lui à 3 ans. Il a beaucoup de sang. Il a toujours été très sensible. On a vraiment pris notre temps. Je me suis mis dessus en fin d’année de 6 ans. Il ne fait que progresser et montre le potentiel pour devenir un cheval de championnat. Quand j’ai commencé à sauter haut en fin d’année de 8 ans avec Fini L’Amour, il en faisait trop. Il sautait sur sa qualité et non sur la qualité de mon équitation. C’est pour ça que je l’ai baissé de hauteur d’épreuve. J’ai commencé à m’entraîner avec Pascal Levy fin mars et il m’a dit que je n’allais pas assez au bout du travail sur le plat. On est allé plus loin dans le travail avec tous les chevaux, d’abord sur le plat, puis bien sûr à l‘obstacle. Il m’a modifié pleins de petits détails qui font toute la différence à la fin pour le haut niveau. On fait un travail formidable. C’est extraordinaire tout ce qu’on a à apprendre des chevaux. On apprend tous les jours et on se remet en question tous les jours. On se trompe souvent en pensant bien faire. C’est une perpétuelle remise en question et c’est beaucoup de travail. Par contre, une fois qu’on est à l’entrée de la piste, il faut mettre tout ça de côté et être sûr de soi.

Il y a quelques jours, vous avez posté une vidéo du 7 ans Hold Up de Talma (Mylord Carthago x Baloubet du Rouet), qui montre lui aussi beaucoup de qualités

Oui. Il montre un grand potentiel et en plus il a une super souche. J’ai aussi un six ans, Inextenso (Clarimoi x Canturo) qui vient du même élevage que Floc, qui est très vert. Il a fallu prendre particulièrement notre temps avec lui, mais je pense qu’il sort du commun. 

On a l’impression que vous avez trouvé un système de formation et de fonctionnement qui vous permet vraiment d’arriver avec des chevaux juste bien comme vous voulez quand vous attaquez les beaux concours.

Avant, j’avais déjà  jeunes chevaux, mais je ne les faisais pas moi-même, parce qu’on ne peut pas tout faire. Chacun son métier. Ce n’est pas le même métier de faire du jeune cheval correctement, donc je mettais mes chevaux ailleurs. Mais au final, je n’étais jamais vraiment complètement satisfaite. Ce n’est pas péjoratif du tout. Je ne critique vraiment absolument pas le travail de personne. Mais je n’ai pas les mêmes exigences que quelqu’un d’autre donc, je devais trouver une solution. J’ai décidé d’avoir mes jeunes chevaux sur place parce que je me rendais compte qu’on passait à côté de certaines choses.Je préfère les avoir sous les yeux. Déjà pour me faire une idée de la qualité. Est-ce que je dois les garder ou les vendre plus rapidement ? Mais aussi, pour voir s’il n’y a pas des petites choses physiques où on est passé à côté, ou alors des choses un peu émotionnelles, etc. Des choses qu’on ne peut voir qu’en les voyant au quotidien. Et puis, on sait que tout est fait comme on veut. On a pas de regret en se disant que ça aurait pu être différent si on les avait eus 6 mois avant. Je travaille avec Michel Grunh, qui est prestataire de service pour moi. Il me sous loue une partie de l’écurie et monte aussi des chevaux d’autres gens. Il s’occupe de mes jeunes chevaux et monte aussi mes autres chevaux quand il y a besoin. Avec moi, il n’a pas d’obligation de performance. Les chevaux sont là pour apprendre et être contents de rentrer en piste. On est raccord sur comment s’occuper des chevaux et les monter. Il profite des infrastructures, mais également des prestataires qu’on fait venir comme Bertrand de Bellabre, Patrick Allori ou encore Pascal Levy. On fait vraiment du très bon travail ensemble.

Aujourd’hui, votre piquet de chevaux est prêt pour vous permettre de vous projeter sereinement dans un planning vers le haut niveau.

Complètement. J’aurais 3 chevaux pour faire les grosses épreuves dans quelques mois. On touche du bois, on sait qu’avec les chevaux, il peut toujours arriver quelque chose, mais évidemment, c’est le plan. Là, je n’ai que Deuxcatsix pour faire les GP 5*, mais l’année prochaine, j’en aurai trois pour faire les Coupe des Nations et les Grand Prix.

Et derrière, vous en avez d’autres à préparer pour l’avenir, qui pourront être “tirés” par le piquet de tête en se formant sur les petites épreuves des beaux concours.

Exactement. J’ai Hold Up qui arrive, mais aussi un autre 7ans, Haribo du Rio (Elvis Ter Putte x Le Tot de Semilly), qui est plus vert et qui va être formidable aussi. J’ai aussi Hip Hop la Vraie Vie ( Cicave du Talus x Tinka’s Boy). Ils sont un tout petit peu en retard. Je leur laisse le temps d’évoluer et de se finir dans leur physique. À la maison, on prend notre temps. Les chevaux de 4 à 7 ans font juste un peu de concours et ils vont au champ. Je les mets au champ tous ensemble, donc c’est un peu une bande de copains.

Vous êtes fixé des objectifs ou c’est vraiment les chevaux qui vont définir la suite ?

C’est toujours les chevaux qui définissent le programme. Il ne faut jamais faire un programme en fonction de ses envies, mais les programmer en fonction des chevaux. C’est la règle. Après, évidemment, il y a des objectifs. Si tout va bien, on va essayer d’être sélectionnable pour les championnats du monde d’Aix-la-Chapelle en 2025. Entre-temps, il y a des CSIO et il y a un championnat d’Europe. De toute façon, il faut essayer, parce que 100 % des gagnants ou tenter leur chance. De mon côté, je me suis réorganisée dans cet objectif. J’ai arrêté d’entraîner, ce qui me prenait beaucoup de temps et j’ai pris un entraîneur. Je mets toutes les chances de mon côté pour faire du mieux possible pour faire du haut niveau. On a pris le temps de bien former des chevaux de qualité. Pour moi, les chevaux arrivent à maturité à 10 ou même 11 ans. Ce que je dis n’engage pas moi et je comprends bien la pression sportive, financière, de beaucoup de cavaliers qui ne sont pas propriétaires de leurs chevaux et où il faut des résultats rapides. Maintenant, il faut tout faire vite. Mais avec les chevaux, ce n’est pas possible. J’ai vraiment le sentiment que, jusqu’à 9 ans, ils prennent sur eux et on leur demande plus que ce qu’ils nous donnent naturellement. On entame le capital moral, confiance et physique. Je n’ai que 7 chevaux aux écuries, mais ce sont tous des avions. 

Donc le but, c’est d’aller faire du beau sport, mais en laissant toujours la priorité aux chevaux.

C’est ma philosophie, mais ça n’engage que moi. Je peux me permettre de le faire comme ça donc je le fais comme ça. Mais encore une fois, je me mets à la place de chacun. Du moment que tout le monde fait du mieux qu’il peut avec ce qu’il a, ça me va. 

De toute façon, si l’on veut que notre sport dure, il faut que le respect du cheval reste une priorité.

Oui. Dans le haut niveau, les chevaux sont mieux soignés que 80 % des gens sur la planète. 

C’est évident que beaucoup de gens qui prennent position n’ont aucune idée de la vie réelle d’un cheval de haut niveau. Mais c’est quand même bien qu’il y ait des règlements qui peuvent servir de garde-fou.

Oui. Nous, professionnels, avons un devoir d’image.On doit être irréprochable. On doit être un exemple. Ça, j’en suis convaincue. Mais après, il y a aussi des règlements de la part des autorités, je parle de la fédération française et de la FEI où il y a des choses où il ne faut pas fermer les yeux. Il faut qu’il y ait des règlements stricts. Quel que soit le cavalier, il faut que la règle soit la même pour tout le monde. Bien sûr, c’est beaucoup de temps de travailler correctement à cheval, mais il n’y a pas mal d’artifices, de matériel, de choses inutiles qui pourraient être évités en travaillant correctement.

Le problème, c’est plus souvent la mauvaise utilisation de cavaliers d’un niveau en dessous, plus que le matériel lui-même.

C’est exactement ça. Charlotte Dujardin en bride, ça ne dérange pas du tout. Par contre, un mauvais cavalier dans une petite épreuve en pelham avec une gourmette serrée, oui, ça me pose un gros problème.

Pour finir, que diriez-vous sur les gens qui critiquent le fait de faire du sport avec des chevaux ? 

Qu’ils ne se rendent pas compte. Mes chevaux passent avant moi. On voue notre vie aux chevaux et on passe à côté de beaucoup d’autres choses. On fait ce métier avant tout parce qu’on les aime. On est profondément passionnés et amoureux des chevaux. J’invite n’importe qui à venir dans mon écurie voir la vie de mes chevaux.

Le Selle Français, meilleur Stud-book au classement Hippomundo de CSO 2024

Le Selle Français, meilleur Stud-book au classement Hippomundo de CSO 2024

Le Selle Français est (au 17/07/24), le meilleur Stud-book au classement Hippomundo de CSO 2024 (selon performances dans compétitions internationales), devant le KWPN et le BWP. 

Le meilleur représentant du Selle Français depuis le début de l’année est Dexter de Kerglenn (Mylord Carthago x Diamant de Semilly), vainqueur du GP 1,60m du CSI5* GCT/GCL de Paris avec Jeanne Sadran il y a quelques jours. Dexter est également 10 ème meilleur cheval mondial par les gains en 2024. Son père, l’étalon SF Mylord Carthago, est actuellement le 4ème meilleur étalon au classement Hippomundo (par les performances de leurs descendants dans des concours internationaux) 2024. Ses meilleurs représentants cette année sont Cocaïne du Val, Truman, Argan de Béliard, Vertigo du Désert, Atome des Etisses, Déesse de Kerglenn ou encore Primavera.

On trouve ensuite : Blood Diamond du Pont (Diamant de Semilly x Arpège Pierreville), Caracole de la Roque (Zandor Z x Kannan), Rokfeller de Pleville Bois Margot (L’Arc de Triomphe x Apache d’Adriers), Donetallo d’Auge (Jarnac x Hello Pierreville), Dynastie de Beaufour (Diamant de Semilly x Cassini I), Dallas Vegas Batilly (Cap Kennedy x L’Arc de Triomphe), Dubaï du Cèdre (Baloubet du Rouet x Diamant de Semilly) et Bond Jamesbond de Hay (Diamant de Semilly x Kannan), qui ont tous remporté plus de 200 000 € depuis le début de l’année. 

Le classement complet des studbook

Parmi les Selle Français qui se font de plus en plus remarquer, on peut également citer les 9 ans : Fancy de Kergane (Bredenn de Kergane x Cor de Hus) 2ème du GP 1,60m du CSIO5* de Falsterbo, Foxy de la Roque (Armitages Boy x Kannan) gagnante du GP 1,60m du CSI4* de La Corogne, Farah Tame (Quadrio Tame x Panama Tame) classée dans le GP 1,60m du CSI5* GCT/GCL de Stockholm, Figureras de Laume (Kapitol d’Argonne x Pezetas du Rouet) 3ème du GP 1,60m du CSI5* de Falsterbo, ainsi que Faylinn de Fondcombe (Lando x Diamant de Semilly) classée dans le GP 1,60m du CSI5* GCT/GCL de Stockholm. Mais aussi le très bon étalon de 10 ans Ermitage Kalone (Catoki x Kannan), qui enchaîne les belles performances sur 1,60m.

Le Selle Français est également bien représenté du côté des épreuves internationales jeunes chevaux. Jalisca Derick (Mylord Carthago x Taquin de l’Extase), actuellement 4ème des 5 ans. Imagine du Vert (Vagabond de la Pomme x Experio) est 5ème au classement des 6 ans. Holidays de Riverland (L’Arc de Triomphe x Kannan), est 9ème du classement des 7 ans.

Cet article a été fait avec grâce aux classements disponibles sur Hippomundo.

Corinne Accary nous parle de Hollywood du Park

Corinne Accary nous parle de Hollywood du Park

Hollywood du Park (Diamant de Semilly x Quidam de Revel) est 4ème du Grand Prix 1,40m Top 7 de Notre Dame d’Estrée avec la manière sous la selle de Nicolas Layec début juillet. Nous avons fait cette interview de son éleveuse Corinne Accary il y a quelques semaines. 

Pourquoi avoir choisi de faire ce croisement-là ?

Je vous avoue que j’étais très Kannan et je n’étais pas spécialement Diamant à la base. Là, j’ai été un peu contre ma nature, en me disant que ce cheval a fait de très nombreux cracks, alors pourquoi pas avec une de mes juments. Quand le poulain est né, j’ai été agréablement surprise, parce que je l’ai trouvé plutôt joli. Grand, mais sportif malgré tout. Il n’avait pas d’articulations trop lourdes. Après, j’ai une lignée qui est très tardive. Donc, je prends beaucoup mon temps. Il a fait trois, quatre sauts à deux ans. Je me souviens, je travaillais à l’époque avec Yannick Gaillot qui montait mes chevaux. Je l’ai appelé et je lui ai dit : « je crois que j’ai mon futur crack. J’ai fait sauter mon deux ans, c’est du grand n’importe quoi ». Puis à trois ans, comme le cheval est grand, honnêtement, je n’ai pas retrouvé ce que j’avais vu à deux ans. Je me suis demandée si je m’étais trompée. Mais, il était grand et il avait un grand galop. En croissance, il n’y arrivait pas bien. Donc, j’étais un peu déçue. Puis, on l’a mis au travail. Tout était très facile et même trop facile pour lui en début de quatre ans. Il avait une très bonne bouche, était très en équilibre, très à l’aise dans son galop et tout était facile. Il sautait “normalement” à la maison. Par contre, quand il était en concours, il entrait en piste et ce n’était plus le même cheval. Ça le transcendait.  Là, j’ai dit : « je crois que j’ai quand même un très bon cheval. Certainement tardif, mais un très bon cheval ». C’est comme ça que toute son histoire s’est faite.

C’est pour ça que vous l’avez gardé entier ?

Oui. Les Quidams sont de super mères de pères, et ça m’a plutôt bien réussi. J’ai vite décidé d’éviter de les vendre. Surtout que pour avoir des Quidam femelles, c’est compliqué. La mère, je l’avais fait tourner un peu à six et sept ans. C’était Sandra Delouis qui la montait à l’époque. C’était une force de la nature. Elle avait beaucoup de sang et un grand coup de dos. Elle a tourné jusque dans les 7 ans, puis je l’ai gardée comme poulinière. C’est comme là que je l’ai mise à Diamant. Je pense que Hollywood a pris le côté force de Diamant et de Quidam. Il a des défauts, comme beaucoup de chevaux, mais il a plein d’atouts pour lui. Premièrement, il a une super tête. Ensuite, il a un très bon équilibre avec une bonne bouche, un bon galop et une excellente fertilité. Il a plus d’avantages que d’inconvénients, je trouve. Je l’ai utilisé sur quelques-unes de mes juments. C’est un peu compliqué, puisque je n’ai qu’une lignée. Mais j’essaye de faire ce qui est “faisable”. Franchement, la première année, j’ai réussi à trouver trois juments où je pouvais le mettre. Les trois que j’avais mis, je les remets parce que franchement, les poulains sont faits comme le père. Ils sont bien en équilibre, ils ont de jolies têtes. Il n’y a pas une patte de travers. Ça arrivera peut-être, mais pour le moment, ce n’est pas arrivé. Ils galopent bien. Ils ont un mental exceptionnel. On les lâche au pré, ils font les idiots comme des poulains, mais on les tient en main. Ils sont très respectueux, très gentils. Pour le moment, je n’ai que des compliments sur  les quelques poulains qui sont déjà nés chez d’autres éleveurs. Ce qui est toujours plutôt sympa.

Ollyana des Hulottes – Hollywood x Faro just SLM (Armitages Boy*Hand in glove)

Comment conseillez-vous de le croiser ? 

Pour le moment, il a l’air de faire des poulains un peu sur son moule, c’est-à-dire en montant comme lui. Des Hollywood en miniature. J’ai mis trois juments qui sont différentes. Par rapport à leur précédents poulains, ceux d’Hollywood sont parmi les plus beaux poulains. Les trois ont beaucoup de similitudes. Ils ont tous de jolies têtes, avec une belle sortie de couleurs et fait en montant. C’est ce qui me marque le plus parce qu’à la base, je n’avais pas une lignée comme ça. Donc, c’est certainement à force d’essayer d’améliorer. Si on prenait mon premier poulain, qui était Diabolo. C’était une force de la nature, mais il était emporté tout le temps par son arrière-main, il avait une très mauvaise bouche. C’était le crack des cracks. Mais il avait un équilibre fait en descendance. Hollywood a une bonne bouche avec un bon équilibre, ce que je n’avais pas avant. Donc, je pense qu’il va être facile. Pour moi, je le vois très classique. Il donne aussi de la taille aux petites juments. Pour le moment, quand il est croisé avec de grandes juments, il n’agrandit pas encore plus la taille. On va forcément avoir un cheval qui est grand, mais ça ne va pas être encore plus grand.

Je ne sais pas si ce sera un super compétiteur, mais je sais aussi que c’est quand même difficile d’atteindre le très, très haut niveau. On croit que c’est facile, parce qu’il y en a beaucoup maintenant, mais c’est quand même quelque chose qui relève de l’exceptionnel. Il ne faut pas l’oublier. Des chevaux pour sauter à 1,50 mètre, je ne vais pas dire qu’on en a à tous les coins de rue, mais on peut quand même en avoir beaucoup maintenant. Pour sauter au-dessus, c’est nettement plus dur. En plus, les cavaliers maintenant vont très vite. Les chevaux vont très vite. Est-ce que le cheval arrivera à faire ça ? Je n’en sais rien. Je l’espère, mais honnêtement, je ne sais pas. C’est très, très difficile. Par contre, je pense vraiment qu’en tant que reproducteur, il va apporter quelque chose. 

Avoir un étalon, c’est quelque chose qui a l’air de vous tenir à cœur.

Je vais vous dire une chose. Diabolo, on m’a empêché qu’il le soit, parce qu’à l’époque, c’était jugé différemment. Je n’ai été qu’une petite parisienne qui n’y connaissait rien. Amateur donc. Nous, les femmes, on est quand même dans un milieu qui est un peu misogyne. Il ne faut pas exagérer. En tant que femme éleveuse, j’ai bien vu que, parfois, on me regardait de travers. Maintenant, avec le temps, c’est un petit peu différent. Au début, quand je parlais de mes chevaux, on ne prenait pas au sérieux parce que je ne suis pas issue d’une famille d’éleveurs. Seulement, maintenant, on voit les chevaux “du Park”, qui sortent, qui sortent. À l’époque, on m’avait empêché de garder Diabolo entier. C’était jugé, pour moi qui étais jeune, par de vieux messieurs de la SHF. Ils avaient osé rigoler, parce que le saut en liberté n’était pas quelque chose d’obligatoire à cette époque-là. Je savais bien que mon cheval n’était pas grand. Il ne faisait qu’1,62 m. Il avait une énorme foulée de galop. Il était beau cheval mais ce n’était pas une gravure non plus. Je m’attendais à ce qu’il soit qualifié pour Saint-Lô. À l’époque, on m’avait ri au nez, en me disant qu’on allait m’éviter un voyage fastidieux, d’emmener mon cheval à Saint-Lô, parce que celui-là, vu comment il était foutu, ça les étonnerait bien qu’il saute…

Hollywood. Ce n’est pas forcément le cheval auquel je pensais au départ, parce que je m’étais un peu retirée de la tête le rêve d’avoir un étalon. Je suis une femme et j’aime bien m’occuper un peu de tout chez moi. Je ne peux pas me permettre, pour des raisons de sécurité avant tout pour moi-même, de garder des entiers qui seraient dangereux à la maison. Il faut qu’ils aient bon caractère. Donc, Hollywood correspondait. Il chante un peu, mais c’est un gentil cheval. À quatre ans, j’ai été obligée de lui faire faire la finale pour le faire approuver, parce qu’il n’avait pas été approuvé à trois ans. Comme je connaissais la qualité et que j’étais un peu têtue, j’ai fait tout le circuit à contrecœur. D’ailleurs, il ne sautait qu’en concours, parce que je ne voulais pas l’user. Il est allé à la finale et il a été approuvé.

Entre la fin de sa saison de 6 ans et le début de sa saison de 7 ans, il a fait une grande pause. 

Oui. À la finale des six ans, il ne s’est pas très bien présenté. Il a fait une bêtise d’entier, il a fait l’idiot au box. Le lendemain, il n’était pas complètement droit. Il est allé à la finale. Ça allait mieux, mais ce n’était pas parfait. C’est la vie, mais c’est vrai qu’il n’avait pas sauté comme il aurait dû sauter. Après, il est parti à la récolte et il a recommencé les concours fin mars. Là, j’aimerais bien qu’il fasse la finale des sept ans, s’il pouvait. Maintenant, le but, c’est qu’il fasse de belles épreuves. Même s’il est encore trop bébé et pas assez mûr, je pense qu’il a de la force. Il faut qu’il arrive à s’économiser un peu plus si on veut que les chevaux vieillissent. C’est joli, les chevaux qui pètent en l’air dans tous les sens, mais malgré tout, il faut qu’ils apprennent parfois à s’économiser. Pour le moment, Bruno Rocuet le gère très bien. On fait en fonction du rythme du cheval, mais pas en fonction d’un calendrier.

L’envie, c’est quand même d’aller faire du beau sport avec et idéalement qu’il fasse une vraie carrière d’étalon ?

Le but, c’est d’aller faire du beau sport, s’il peut, s’il en est apte. C’est pour ça qu’on fait attention. 

Dans quelles conditions est-il disponible cette année ?

Il n’est disponible qu’en congelé. De toute façon, il le sera toujours, sauf en cas d’accident. Le cheval a une excellente semence, vraiment très, très bonne. Il a rempli des juments qu’il ne remplissait pas depuis deux ou trois ans. Il y aura toujours des juments qu’il ne remplira pas, mais le cheval remplit vraiment très, très bien. En plus, je trouve qu’on ne peut pas courir deux lièvres à la fois. Il y en a qui le font. Tant mieux si les chevaux sont capables de le faire aussi, mais je trouve qu’il faut faire un choix.  Pour le prix, c’est 360 euros pour les frais techniques, avec l’envoi des doses, puis 650 euros à la naissance du poulain. Il y a 12 paillettes dans le contrat. Le but, c’est que les gens aient un poulain. Pour les éleveurs qui lui confient plusieurs juments, ils ont un tarif spécial de 30 % de réduction sur le tout (frais techniques et solde) à partir de la deuxième jument. Depuis début juillet, tous les nouveaux contrats souscrits bénéficient d’un report des frais techniques pour 2025 en cas de vacuité.

Une histoire de filles et premier succès brésilien à Chantilly

Une histoire de filles et premier succès brésilien à Chantilly

Communiqué R&B Presse, Chantilly, samedi 13 juillet 2024

Un « gros » Grand Prix de Chantilly avec 50 candidats au départ et seulement cinq barragistes. Le parcours du chef de piste olympique Gregory Bodo n’aura pas été très indulgent et cela donne d’autant plus d’éclat à la victoire de la Brésilienne Luciana Lossio et sa jument de 14 ans, Lady Louise Jmen devant des tribunes pleines. Une épreuve de prestige bien ancrée dans les agendas des afficionados du saut d’obstacles.

Treize obstacles au programme du premier tour, dont un double et un triple, le tout culminant à un bon mètre cinquante. Une première manche « divisée » en deux parties, car, en raison de l’état du sol malmené par les intempéries, certains obstacles ont dû être déplacés, ce qui a conduit à une nouvelle reconnaissance du parcours pour les vingt-cinq derniers concurrents d’une liste de départ de cinquante cavaliers. Pourtant, malgré ses 16 points avec Equine America Unick du Francport, John Whitaker ne voulait pas forcément accabler le terrain : « Je ne pense pas que ce sol soit si mauvais, mais aujourd’hui, les gens sont un peu trop gâtés et habitués à des pistes trop parfaites ».

Luciana Lossio : “gagner devant un tel décor, c’est incroyable”. © Cecile Sablayrolles

Ce rééquilibrage des chances aura permis d’ajouter deux nouveaux sans-fautes aux trois de la première partie, et ils étaient donc cinq candidats à la victoire, dont quatre femmes, à en découdre sur les sept obstacles du barrage. Quel que soit le début de l’histoire, le barrage d’un Grand Prix est toujours un grand moment et celui-ci n’a pas failli à la règle. Premier sans-faute de la première manche, une semaine après sa première victoire en 5*, la Française Ines Joly, a doublé la mise avec un deuxième sans-faute de Platini De Kalvarie. Le premier chrono était « posé », mais l’Américaine Alise Oken et Gervera l’améliorait aussitôt de quelques centièmes. Le Français Valentin Besnard avec Diamantina Beaufour sortait du débat qui ne devait être finalement qu’une affaire de femme. La Nordiste Juliette Faligot et sa bondissante Arqana De Riverland prenaient à son tour le commandement. Mais il était écrit que la victoire dans ce deuxième Grand Prix de Chantilly Classic était destinée au Brésil. Sans véritable plan, « j’ai seulement galopé et galopé », Luciana Lossio et Lady Louise Jmen ont mis tout le monde d’accord avec un écart de plus de deux secondes ! « C’est ma plus belle victoire et elle prend encore plus de dimension dans ce lieu extraordinaire, entre ces deux palais. C’est incroyable, je suis tellement heureuse. C’est la première fois que je suis ici et c’est comme un rêve devenu réalité ». À vrai dire, cette victoire n’est pas complètement une surprise, car, même si elle n’évolue sur le circuit international que depuis trois ans, la Brésilienne de 49 ans et sa géniale jument baie comptent déjà de beaux succès en CSI 5*, notamment une victoire dans le Grand Prix de Wellington, en Floride, au printemps dernier. Établie provisoirement en Belgique, Luciana va maintenant rentrer au Brésil… avec des étoiles plein les yeux.

Tribunes pleines à Chantilly pour salier la première victoire brésilienne sur la piste des Grandes écuries © Cecile Sablayrolles