Quelques jours après le CSI4* de Deauville où il prenait la 8ème place du Grand Prix avec Touardo Blue Z, le cavalier Belge Nathan Budd a répondu à nos questions.
Mi-août, tu as participé au CSI4* de Deauville avec deux étalons dont on parle de plus en plus : Coldplay des Rosiers et Touardo Blue Z. Peux-tu nous parler d’eux ?
Coldplay, c’est un étalon de 8 ans qui est né chez nous (au Haras des Rosiers). Je monte quasi depuis le début. Mon cavalier, Paul-Emile Blaton, l’a un petit peu monté à cinq et au début des six ans, puis je l’ai récupéré. C’est un excellent cheval. Je pense qu’il a toutes les qualités dont un cheval de sport a besoin aujourd’hui. Il y a plus ou moins deux ans, on a décidé de mettre un peu plus en avant la partie étalon. Ça fait deux ans d’affilés qu’il est disponible en frais en Belgique, ce qui explique qu’il a été un peu absent des terrains de concours. Il a sauté les 8 ans pendant le 5* de Fontainebleau, puis on l’a arrêté pour qu’il se consacre à la saillie.Il a fait 2 tours à Valkenswaard puis il a sauté au 4* de Deauville. Maintenant, on va essayer de se concentrer un peu plus sur le sport.
À ce niveau-là, ça devient difficile de faire les deux en même temps.
Exactement. C’est un cheval qui a énormément de qualités, énormément de respect, et qui dit ça, dit aussi un peu sensible. Il faut faire les choses correctement. Jje pense que c’est le moment où il faut recommencer à mettre le sport un peu plus en avant.
C’est un cheval qui a tendance à en faire un peu, voire même beaucoup “trop” parfois. Non ?
Oui, un peu, c’est ça. Il est un peu excessif dans tout ce qu’il fait. J’ai toujours fait un programme par rapport à mes chevaux, en faisant attention à ce que ce ne soit pas eux qui soient obligés de matcher avec le programme. Maintenant qu’il a fini la saison de monte, on va regarder un petit peu comment il évolue et à quelle vitesse il revient à son niveau avant de pouvoir ressauter de plus grosses épreuves..
Il restera disponible en congelé ?
Tout à fait. Le congelé sera toujours disponible. Pour ce qui est frais, je vais devoir regarder un peu avec mon propriétaire ce qu’il veut, mais je pense que, gentiment, ça va être le moment de pouvoir se concentrer un peu plus sur le sport que sur le reste.
Coldplay des Rosiers
Pour l’instant, ton cheval de tête, c’est Touardo.
Exactement. Il est arrivé chez moi il y a un peu plus de deux ans. Il a fallu le temps que je me mette avec, que je comprenne son fonctionnement. Beaucoup de personnes ont eu tendance à le comparer avec Cashpaid, parce qu’il est aussi étalon, grand, bai… Mais ce sont deux chevaux différents. Il a fallu le temps qu’on se mette ensemble, qu’on se fasse confiance et qu’il rattrape un tout petit peu le retard qu’il avait, parce qu’il avait été un petit peu arrêté avant de venir chez moi. Maintenant, il est en train de revenir vraiment en pleine forme. Déjà l’année passée, il avait fait une bonne saison par rapport à ce qu’on attendait de lui. Mais cette année, je sens qu’il est en train de passer un cap et il nous l’a montré encore dans le Grand Prix de Deauville. C’était un bon grand prix et il est sorti sans faute, assez facile. Il y a encore pas mal de choses à faire évoluer pour le futur, mais c’est un cheval qui va sauter des gros grands prix.
Il a l’air très régulier.
Oui, de plus en plus. Il fait énormément de sans-faute. Quand je ne suis pas sans-faute, c’est parce qu’on manque un peu d’expérience par rapport à ce qu’on lui demande. Il rattrape assez vite ce petit manque d’expérience, et quand c’est acquis, c’est acquis. Sa régularité sur 1,50m / 1,55m est assez impressionnante. C’est un cheval sur qui on va pouvoir compter dans le futur.
Touardo Blue Z
Tu as beaucoup d’étalons dans ton piquet. Ce ne sont pas toujours les plus faciles à gérer au quotidien comme en concours. Tu as une affinité particulière pour le tempérament des étalons ?
Je ne sais pas. Je ne vais ni dire oui ni dire non. Je travaille avec le Haras des Rosiers depuis plus de 13 ans. On avait toujours dit qu’on allait garder les juments et les étalons. De fil en aiguille, on a eu de plus en plus de très bons étalons. C’est Bernard Demets qui nous a suggéré de mettre un peu plus en avant ces étalons. Chose qu’on a fait, mais on n’a pas décidé qu’on ne faisait que des étalons. C’est juste qu’on a en ce moment plusieurs étalons qui commencent à prendre un peu plus d’âge et qui arrivent au plus haut niveau.
Ces étalons ont l’air d’avoir plutôt tous un bon caractère.
Oui. On a essayé de bien gérer les choses. J’ai une équipe qui travaille très bien à la maison. La plupart sont nés chez nous, donc on arrive à savoir dès le début lesquels vont pouvoir être gérables et pas gérables. Un cheval qui est trop compliqué au niveau caractère, on ne va pas le garder étalon. Je pense que le travail en amont est bien fait. Comme ils sont au Haras, ils ont l’habitude de voir des juments, des poulains, etc… Ça bouge tout le temps et ils sont habitués à ça.
Tu es cavalier de concours, mais avec le Haras des Rosiers, tu es aussi plongé dans l’élevage. C’est quelque chose que tu aimes ?
Oui. Le Haras des Rosiers, c’est un élevage qui me tient à cœur. Et de plus en plus, parce que maintenant, j’ai des poulains qui naissent de juments que j’ai montées, où je connais le père, je connais la mère, je connais la famille. C’est assez agréable. C’est des chevaux qu’on voit naître et qu’on fait évoluer jusqu’au niveau. L’atout de ça, c’est qu’une fois qu’on arrive au niveau, on connaît vraiment les chevaux. Ils sont formés à ma façon de faire, donc c’est plus facile par la suite.
H’Aubigny de Talma
Aujourd’hui, tu as un fonctionnement et des chevaux pour aller faire du très haut niveau. C’était un objectif dès le début ?
Je mentirais si je disais que ça n’a pas été mon objectif. J’ai toujours rêvé ça depuis que je suis gamin. Après, est-ce que c’était un rêve ou un objectif ? Je ne sais pas. Mais les choses ont fait que j’ai rencontré mon propriétaire, puis de très bons chevaux qui ont fait que, petit à petit, ça devenait envisageable et possible. Je pense que mon propriétaire m’a suivi dans ce rêve, qui était de pouvoir arriver vers le plus haut niveau. Aujourd’hui, c’est sûr que c’est devenu mon objectif. Après, on n’a jamais “brûlé” un cheval pour le sport. Ça a toujours été et ça restera toujours les chevaux avant le sport.
Les Jeux Olympiques de Paris viennent de se terminer. Participer aux JO, c’est un rêve ?
Bien sûr ! C’est un rêve. On a vu cette année à Paris un événement qui était plus que réussi, avec une organisation incroyable. Je pense que ça a fait rêver tout le monde. En équitation, mais aussi dans tous les autres sports. Je pense que c’est une mise en avant du sport en règle générale qui est magique. C’est sûr que les jeux restent quelque chose qui fait rêver. Après, c’est beaucoup d’appelés pour peu d’élus. Est-ce que c’est possible d’y arriver ? Je ne sais pas. Mais c’est ce serait mentir de dire qu’on ne rêve pas un jour d’avoir la chance de pouvoir participer aux JO pour son pays.
On voit que tu as des chevaux prometteurs dans les jeunes générations aussi. Tu devrais donc pouvoir construire un bon piquet de chevaux pour l’avenir.
J’ai la chance d’avoir mon propriétaire qui élève très, très bien, et donc d’avoir un “stock” de chevaux à ma disposition, avec une qualité de chevaux qui est assez impressionnante. Il y a beaucoup de travail derrière tout ça. Mais aujourd’hui, on a vraiment une super qualité de chevaux. Après, de bons cavaliers, il y en a beaucoup. Il va falloir essayer d’être encore meilleur et de travailler pour. Mais c’est vrai que j’ai la chance d’avoir un piquet de chevaux qui est encourageant pour la suite. Encore aujourd’hui, j’ai fait sauter des 4 ans ici, à l’entraînement et je vois que j’ai un paquet de bons 4 ans. J’ai quelques bons 5 ans, quelques bons 6 ans. Chaque année, j’ai quelques bons chevaux et c’est encourageant de se dire qu’on travaille tous les jours pour avoir un piquet de chevaux suffisant pour pouvoir essayer de rivaliser au plus au niveau.
Tes chevaux actuels vont pouvoir te servir de locomotive, pour former les autres chevaux pour la suite en allant déjà sur de beaux concours.
Bien sûr, c’est certain. Il y a dans une écurie une ou deux locomotives qui tirent un peu tous les autres. C’est certain que dans notre manière de voir les choses, la formation des jeunes chevaux est importante. Je continue à monter des 4 ans et j’ai un œil sur tous les jeunes chevaux qu’on a, même avec nos autres cavaliers, pour essayer de construire au fur et à mesure et de faire les bons choix. C’est un travail de tous les jours, avec toute une équipe. C’est très important.
Coldplay des Rosiers
D’ici les prochains JO, il y a d’autres beaux événements de prévus. Il y en a déjà que tu as dans un coin de la tête ?
Bien sûr. Les championnats d’Europe c’est un championnat qui est un petit peu plus accessible pour faire ses débuts. Après, on est dans un pays où il y a énormément de bons cavaliers et de bons chevaux. De toute manière, comme j’ai dit, ce sont mes chevaux qui vont me dire ce qu’on est apte à faire ou pas. Je ne vais pas forcer les choses pour une échéance en particulier. C’est sûr que tous les championnats, les coupes des nations et les 5* en général font rêver, mais ce n’est pas si facile de pouvoir y avoir accès. Mais quand on y est, on voit ce que c’est et ça donne envie d’y rester. Avec les chevaux que j’ai, je pense que dans un an ou un an et demi, on devrait pouvoir prétendre à ces concours en y étant plus régulier au niveau de la présence et des performances. Il faut avoir plusieurs chevaux pour pouvoir faire un roulement et donc plus de concours. Qui dit plus de concours, dit plus d’entraînement. Quand on est en 5* tous les week-ends, ça devient un peu plus banal de sauter un GP 5*. Quand on a la chance de la faire une fois de temps en temps, c’est déjà génial, mais on a plus de pression et c’est plus dur pour nous que pour les cavaliers qui le font tout le temps. J’ai déjà eu la chance de rencontrer Sylvie Robert qui m’a donné accès à pas mal de beaux concours. Et ça a à chaque fois été plutôt bien. On continue à faire, pour pouvoir en faire plus et avoir les chevaux qui sont prêts. Je pense qu’on est dans le bon chemin.
Pour terminer, un petit mot sur l’encadrement de l’équipe belge et la possibilité d’accéder à des places sur les beaux concours ?
On est un pays avec énormément de bons cavaliers et de bons chevaux. Maintenant, de ce que je vois, ce n’est pas impossible. Il faut être bon, avoir les bons chevaux au bon moment et essayer de prendre sa place. Aux jeux, quelqu’un comme Gilles Thomas a eu sa chance. C’est un excellent cavalier, avec un excellent cheval, mais mine de rien, c’est un jeune qui a pris la place de certains autres. Il y a des choses qui sont possibles, Ça reste ouvert. Je pense qu’on a de la chance d’avoir deux très bons sélectionneurs, avec qui l’on peut discuter et qui osent donner leur chance à de plus jeunes cavaliers. C’est un atout pour nous. Après, il n’y a pas de miracle. On a sa chance quand on est bon. Donc, avant de demander quoi que ce soit, il faut que les résultats soient là. Quand on fait quelques résultats en 3 et 4*, on peut essayer de les toquer à la porte pour avoir de temps en temps un 5*.